Can2025

CAF, réveille-toi ! [La palette afrikaine de Philippe Doucet]

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La CAF a donc fini par accoucher ! La CAN 2025 a,
tout à la fois, un lieu et, enfin, une date. Il y a déjà plus de
deux ans, j’avais ouvert le débat sur une CAN qui aurait bien du
mal à se dérouler à l’été 2025. Vendredi dernier, soit un an
seulement avant la période prévue, la CAF en est arrivée à la même
conclusion. Récit d’un report annoncé… et réflexion sur une
solution d’avenir !

Par Philippe Doucet,

Ainsi donc la
CAN
2025
commencera bien en 2025 (c’est devenu rare sur le
continent…), mais finira en 2026.
La faute à un paquet
d’indécisions et d’influences qui ont fini par rendre le choix
inextricable. Dans un monde normal, on aurait dû connaître ces
dates depuis… une bonne
année ! Ainsi, nous savons déjà que la Coupe du monde 2026 aura
lieu du 11 juin au 19 juillet. Et celle des clubs du 15 juin au 13
juillet 2025…

Ce dernier rappel est
indispensable pour comprendre l’invraisemblable inaction de
la CAF sur ce dossier
. La FIFA a, en effet, lancé un
serpent de mer nommé « Coupe du monde des clubs »
pour essayer d’entrer de plein pied dans le business du football de
clubs, un peu trop réservé à l’UEFA selon elle. De fait, sur quatre
ans, la Ligue des Champions génère trois fois plus de droits TV
qu’une Coupe du monde . Ca ne pouvait échapper à l’ancien
Secrétaire Général de l’UEFA devenu Président de la FIFA
!

“La CAF a-t-elle seulement
songé à mettre une quelconque pression sur la FIFA
?”

Mais, pour l’Afrique, tout
commence vraiment avec le report de la CAN en Côte
d’Ivoire
à janvier 2024. Lorsque la CAF découvre enfin
que le climat ivoirien n’est guère plus favorable que celui du
Cameroun à une CAN en pleine saison des pluies ! Dès lors,
le calendrier pour, à la fois, les qualifications CAN et Coupe du
monde 2026, devient très serré
. Tout à son imprévoyance,
la CAF réussit alors l’exploit d’adopter une formule avec des
groupes de 6 (soit 10
matches à jouer + 2 matches de barrage) pour la qualification à la
Coupe du monde. Dès lors, je m’étais autorisé à annoncer que la CAN
2025… n’aurait pas lieu en 2025 !

Dans les faits, le calendrier
devenait totalement obstrué et il ne fallait aucun obstacle (pas
même un match reporté…) pour arriver à tout boucler à temps.
Surtout, restait l’épée de Damoclès de la nouvelle formule de la
Coupe du monde des clubs, annoncée depuis déjà deux années sans
être encore une certitude. Et si la CAF n’a jamais fixé de
dates pour la CAN 2025, ce n’est évidemment pas pour un problème de
stades au Maroc. C’est bien qu’il y
avait un blocus FIFA sur cette date de juin
2025. 

En fait, la CAF
attendait docilement que la FIFA soit certaine d’organiser sa Coupe
du monde des clubs à 32 et lui pique la place dans le
calendrier.
A-t-elle seulement songé alors à mettre une
quelconque pression sur la FIFA en annonçant ses dates ? Pour une
fois, la période choisie était favorable et l’Afrique pouvait au
moins titiller la FIFA. Que nenni ! La CAF a perdu le temps
nécessaire, comme s’il était normal qu’un tel événement, vital
économiquement pour elle, ne soit même pas programmé…

La CAN 2025 a donc été
fixée… là où on pouvait”

Certes, la CAF a donné le change
pour nous faire croire qu’elle pouvait organiser la CAN après la
Coupe du monde des clubs. Juillet-août au Maroc paraissait
effectivement tellement idéal pour les joueurs en manque de
chaleur… Sans compter les joueurs (les meilleurs Africains,
forcément !) qui auraient dû doubler l’épreuve mondiale et
africaine, et les sélections composées de joueurs évoluant au pays
comme l’Egypte avec Al Ahly…). C’était la
catastrophe annoncée avec une ribambelle de forfaits
prévisible. 

La CAN 2025 a donc été fixée…là
où on pouvait. Pendant les fêtes de Noël 2025. Pendant le « Boxing
day » anglais aussi… Mais, cette fois, il ne fallait pas déplaire à
l’UEFA qui a fixé les deux dernières journées de la phase de groupe
de la Ligue des Champions à la fin janvier. Jamais
l’instance européenne n’aurait pu prendre un tel risque il y a
encore cinq ans. Mais elle a abusé de la faiblesse de la
CAF
qui avait annoncé en 2017 faire passer la CAN en juin…
pour finalement ne jamais l’organiser à cette date (sauf 2019…). La
CAN n’aura donc plus jamais lieu à ses dates traditionnelles de
janvier-février comme depuis 1992… Et, à force de se faire
balader, on mesure à quel point une CAN tous les 4 ans se rapproche
à grand pas. La CAF ne l’aura pas volé…

Elle s’est mise en
situation de dépendance totale vis-à-vis de la FIFA qui, non
contente de siphonner 54 voix d’un seul bloc lors des élections,
abuse de son interlocuteur sans guère lui apporter.
Où est
le contrat TV mirifique qui devait compenser largement la
répudiation de Lagardère ? Si la CAF s’en est plutôt bien
sortie sur l’édition ivoirienne, elle a réussi à perdre de l’argent
sur la CAN 2021 au Cameroun ! Où en est l’African Super League annoncée
par Gianni Infantino lui-même dès 2019 ?
Vous savez,
le mirage qui allait enfin permettre aux clubs africains de vivre
des compétitions continentales… Elle est toujours
« programmée » pour 2025 en format exhibition sur
invitation. Et toujours sans moyens…

Vous me direz que la CAF n’a pas
besoin de la FIFA pour négliger ses propres épreuves. La
CAN féminine a ainsi été
reportée d’un an à l’été 2025 au Maroc, toujours. Les équipes sont
pourtant déjà qualifiées depuis plus de six mois… Quant au
CHAN, il a, pour
l’instant, disparu. Peut-être y repensera-t-on lorsque la CAN aura
lieu tous les quatre ans…

La nécessaire refonte du calendrier international

Il est grand temps que la CAF
ose dire deux mots à la FIFA après tant de reculs. Par exemple, en
pesant sur le débat du calendrier international. Celui-ci
est, à l’évidence, calqué sur les intérêts européens.
La
séquence des trêves internationales de septembre, octobre et
novembre ne pose ainsi aucun problème au plus petit des continents.
Mais impose un calvaire aérien aux africains, sud-américains voire
asiatiques avec des voyages intercontinentaux coûteux pour les
états et épuisants pour les joueurs. 

Je pensais naïvement que
l’expérience Qatar 2022 pourrait faire avancer la cause. Après
tout, la Coupe du monde dans le Golfe s’était jouée en
novembre-décembre, prouvant qu’on pouvait ouvrir une autre fenêtre
que celle traditionnelle de juin-juillet. Si l’on a bien compris
que la tranche janvier-février était maintenant condamnée pour
l’Afrique et que les vacances de Noël ne sont pas forcément
indiquées pour tout le monde (l’Amsud est largement chrétienne),
le modèle qatarien est finalement la meilleure solution
pour le monde entier

FIFA President Gianni INFANTINO, Emir Qatar, Sheikh Tamim bin Hamad AL THANI, Lionel Messi, Coupe du monde 2022FIFA President Gianni INFANTINO, Emir Qatar, Sheikh Tamim bin Hamad AL THANI, Lionel Messi, Coupe du monde 2022
© IconSport

Avec une fenêtre d’un
mois en novembre-décembre, l’Europe peut regrouper ses
qualifications en jouant de 6 à 8 matches. Surtout, l’Afrique
subsaharienne peut y organiser la CAN.
Tandis qu’un pays
du Maghreb pourrait opter soit pour novembre, soit pour juin. De
son côté, l’Amsud aurait enfin droit à une Copa America en été
plutôt qu’en hiver ! Idem pour certaines zones asiatiques. Quant à
la Coupe du monde, elle peut aller
indifféremment partout dans le monde en choisissant soit juin, soit
novembre selon le besoin climatique. De fait, il y aurait donc deux
grandes périodes de trêve internationale (juin-juillet et
novembre-décembre). Ce qui favoriserait aussi un foot de sélection
de meilleure qualité avec des équipes enchaînant matches et
entraînements sur une période plus longue. 

Bien sûr, il y aura toujours
quelques inconvénients, notamment pour le pays qui verra sa star
blessée pour toute une tranche de qualification. Et on peut aussi
modérer la réforme en laissant une courte tranche en septembre
et/ou en mars pour permettre de jouer quelques amicaux avant les
grandes épreuves. 

Bref, il est grand temps
que l’Afrique profite de ses problèmes récurrents de calendrier
pour peser sur les débats. Qu’elle se réveille enfin et pousse la
FIFA au dialogue en offrant des solutions constructives
,
et guère conflictuelles comme ici. D’autant que, sur ce dossier
calendrier international, cela pourrait contribuer à
accélérer une réforme sur laquelle la FIFA a pris une lenteur
très…africaine
.



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